Homo Sapiens, Homo Aeternalis, Homo Ethicus ?


Le vieillissement est-il une maladie ? Homo Sapiens… Homo Aeternalis ou/et Homo Ethicus ?

Le monde change et la place de l’homme avec lui.

Au sein de l’aventure humaine, il s’agit d’une évolution logique, prévisible, pour ne pas dire naturelle.

Depuis l’aube de l’humanité, le développement des savoirs, des techniques et de leurs applications, modifie le regard de l’homme ainsi que sa perception de lui-même et de son environnement. Chaque progrès technologique apporte l’espoir d’une amélioration des modes de vie et d’une existence meilleure aux plans individuel et sociétal.

Cependant se fait jour une notion d’incertitude, voire de mal-être, liée aux effets secondaires des progrès technologiques, par absence de visibilité sur le long terme, particulièrement quant aux dérives ou excès potentiels.

Ainsi depuis plusieurs décennies, la notion de progrès s’associe trop souvent à celle de profit, au lieu d’être synonyme de bénéfice. Bénéfices pour les structures à l’origine des recherches et des applications, bénéfices humains individuels et collectifs, quant à l’évolution de l’humanité.

La perception collective d’être arrivé au carrefour d’une société et d’une humanité en possible mutation s’amplifie en raison de la convergence de plusieurs facteurs dominants, tels que :

  • la prépondérance du numérique, de l’intelligence artificielle et de la future robotique,
  • le développement des recherches en biotechnolologie et leurs applications,
  • l’émergence d’idées nouvelles telles le Transhumanisme, exprimant l’augmentation artificielle des capacités humaines,
  • L’accélération exponentielle de ces processus qui n’est plus en phase, ni avec la base de temps des mécanismes évolutifs habituels, ni avec leurs intégrations et acceptations psychologiques et sociologiques,
  • La prise de conscience enfin, que, pour la première fois dans l’évolution humaine, le futur n’est pas seulement en relation avec des facteurs indépendants de l’Homme, mais bien en rapport avec les conséquences de ses actes.

L’essor fulgurant de la recherche et des nouvelles technologies interpelle donc tous les domaines de notre vie et amène à de nouvelles inquiétudes humaines, économiques, sociétales et politique. De ce fait s’ouvrent de nouvelles interrogations et prises de con- sciences, particulièrement quant aux futurs sens de la vie et futurs statuts de l’Homme. Nous allons tous y être confrontés

Il est fort probable que les notions de “travail”, de “bien-être” et de son sens, le concept de “l’humain” et de son sens, l’essence même de la vie vont être à repenser et à redéfinir, voire à reconstruire.

En effet, depuis l’aube de l’humanité, l’Homme a essayé de survivre, puis, par son travail, de vivre. Les progrès techniques et culturels lui ont permis de construire la notion du “bien-vivre”.

Le carrefour inter-générationnel actuel l’incite, en toute lucidité et responsabilité, à se réaliser et s’épanouir maintenant dans le concept du “mieux-vivre”. Les prolongements logiques de cette évolution s’ouvrent sur le passage du “mieux vieillir” au “bien vieillir”. Qui ne souhaiterait d’ailleurs pouvoir concilier une longévité augmentée avec le recul de la sénescence et de ses pathologies physiques ou cognitives?

Il n’existe cependant aucune structure vivante, animale ou végétale qui ne subisse un processus de vieillissement. Il existe même semble-t-il pour chaque espèce, une pré-programmation génétique ou physico-chimique, seule la base de temps étant différente, de quelques heures à quelques millénaires.

Les mécanismes classiques du vieillissement cellulaire sont connus (raccourcissement des télomères, trouble de la méthylation, diminution du sulfure d’hydrogène, anomalies de la réplication et oxydation cellulaire, etc) et sont à l’origine de nombreuses recherches afin de neutraliser ces anomalies et permettre une longévité de qualité.

D’où l’émergence d’un questionnement surprenant à possible point de départ transhumaniste : le vieillissement est-il une maladie ?

Surprenant en effet, car le vieillissement est l’évolution naturelle de toutes formes de vie et la maladie d’ailleurs en elle-même, est inscrite dans des processus relevant de mécanismes naturels. Instinctivement, chaque individu intègre la notion classique que certaines maladies peuvent donc être à l’origine du fait de vieillir et surtout que l’état de vieillissement par lui-même accélère secondairement l’apparition d’anomalies vitales.

L’effet de surprise relève d’une notion de rupture dans cette suite logique par inversion de la cause et des effets. L’introduction d’un concept de maladie, vue comme un accident, c’est-à-dire d’une pathologie en lieu et place d’une évolution de la vie vécue depuis l’aube de l’humanité comme naturelle et incontournable, interpelle par ses projections. Au-delà de cette conception nouvelle et du traitement d’une pathologie afin de pouvoir la combattre, sinon l’éradiquer, le regard ne peut que s’extrapoler dans la direction d’une éternelle jeunesse, sinon d’une pseudo-immortalité.

C’est s’interroger aussi sur la quête du sens et sa finalité.

Poser cette question obligera donc à réfléchir sur des paramètres, et des situations futures qui intégreront des repères autres que normatifs. La vision portée par une société sur la notion de vieillir étant corrélée aux évolutions des conditions de vie, entre autres.

Ainsi, aborder les variations anormales du vieillissement, source de pathologies, afin de pouvoir les traiter est parfaitement compréhensible et légitime, car c’est ouvrir de fait la porte d’une espérance. A titre d’exemples citons : la maladie de Progéria, bien que rarissime, liée à une mutation génique ; l’insuffisance ovarienne précoce fréquente ( 1/1000 avant 30 ans, 1/100 avant 40 ans ), à l’origine d’infertilité et de ménopause prématurée ; les maladies neurodégénératives, etc…

Entrevoir des mécanismes préventifs, les proposer et les diffuser, afin de repousser le vieillissement est parfaitement compréhensible et là aussi légitime, car en adéquation avec la recherche d’une qualité de vie et la volonté d’une amélioration de l’humanité.

Vouloir amplifier les potentialités humaines, soit en modifiant le génome, soit en réalisant des greffes ou implants technologiques, afin d’acquérir des capacités inégalées à ce jour, tant aux plans physiques et cognitifs, qu’au plan d’une extension de la durée de vie, peut paraître là encore compréhensible, mais quelle en est la légitimité ? Et pour qui et jusqu’où ? Il faut bien considérer que le vieillissement réussi est une chance mais que tous n’y ont pas accès.

Vieillir n’est pas la question principale, l’interrogation est plutôt … vieillir pour quoi ? Au-delà de l’instinct de survie, vieillir pour soi-même est-ce suffisant, ou bien pouvoir transmettre l’élévation du regard qu’apporte l’expérience afin d’amplifier une conscience collective n’est-elle pas une meilleure option ?

C’est à cet instant que s’ouvre la quête du sens, source de multiples réflexions porteuses d’une indispensable dimension éthique quant aux réponses et possibles applications.

Indépendamment de la nécessité de préciser les critères du vieillissement, ainsi que leurs images et leurs réalités individuelles et sociétales, cette question appelle à :

  • définir l’Homme, aussi bien dans sa structure, ses invariants et ses variables, que dans sa constante évolution et sa pérennité,
  • le situer au sein des modèles économiques, sociologiques et politiques. Est-il à l’interface de courants de pensées, par exemple : transhumanisme d’un côté – écologie de l’autre ? Il y a t’il nécessité de le modifier artificiellement, ou n’est-il pas préférable de modifier son comportement et ainsi préserver, outre l’environnement, les incontournables interrelations épigénétiques ?

Peut-il enfin, rester maitre de lui-même, de son futur et de son destin ou risque-t-il de devenir un simple bien de consommation. De ce fait, le vieillissement constitue-t-il un état et définit-il un statut par lui-même ?

Enfin, une nouvelle incertitude se fait jour : la finalité de savoir si le vieillissement est une maladie, que ce soit au plan culturel, philosophique et même psychanalytique. S’agit-il d’une dynamique philanthropique orientée vers un futur bien-être, une espérance de dépasser les limites humaines, une réponse moderne soutenue par la science à l’inéluctable angoisse existentielle ou bien les prémisses d’une future économie de marché ? Si tel est le cas, quels en seront, les exclusions sociales à payer ?

L’anticipation des conséquences individuelles et collectives ne pourra être évitée. A la croisée des chemins de ces interrogations et de leurs interrelations, la réflexion éthique est donc bien devenue incontournable.

Car nous préparons le futur et nous en sommes tous responsables.

Au-delà d’un questionnement sur l’origine potentielle du vieillissement, il est nécessaire de développer une vision élargie, voire inclusive de l’innovation technologique par une approche exigeante qui nous renvoie à notre responsabilité.

Recherche et applications trouveront leur crédibilité dans les exigences à préserver notre patrimoine humain et social, en association avec celles de l’intérêt général.

Le propos actuel n’est donc pas de répondre à toutes les questions spécifiques qui peuvent se poser, il s’agit avant tout de sensibiliser aux questionnements éthiques, sujets si cruciaux et problématiques de nos jours et promouvoir les prises de consciences qui en résultent sur les conséquences de nos agissements.

Chacun ainsi, pourra, en liberté de conscience, dans les réflexions et les pratiques, apporter avec un regard innovant et responsable, une aide aux décisions qui soit garante des valeurs humaines.

Ces réflexions sont celles que portait ANTHONY et pour lequel la Fondation ANTHONY MAINGUENE, sous égide de la Fondation de France, a été créée afin d’honorer sa mémoire et surtout porter ses idées, transmettre son sens éthique et ses espérances notamment dans l’enseignement supérieur, la recherche et l’entrepreneuriat.

Bien avant les nouveaux questionnements actuels, il avait compris que le respect et la priorité donnés au sens humain sont indispensables à une qualité de vie, au bien-être au travail et à la réussite de toute action ou entreprise, quels qu’en soient les domaines.

Ainsi pour la Fondation ANTHONY MAINGUENE, l’éthique relève d’une dynamique, celle de percevoir avec un regard prospectif et responsable, les
lignes de force quant à l’évolution des concepts, leurs conséquences et leurs applications pratiques, techniques, juridiques et humaines.

Il est possible de dire que la morale oblige, la déontologie encadre, l’éthique éclaire. Elle prolonge ainsi la perception de ce qui est licite, par celle de ce qui est légitime. Elle devient donc motrice de l’évolutivité de la société et protège des dérives. Redonner du sens, resituer l’humain, concevoir une nouvelle éthique dans les relations à l’Autre et à soi-même, devient une nécessité pour préserver l’avenir.

En ouvrant les réponses elle peut par son application nous amener au libre choix et à l’art de la décision, avec la vision d’une responsabilité prospective.

Car notre monde bouge rapidement et quels que soient les secteurs d’activité nous oblige à associer vouloir bien faire et savoir-œuvrer.

Nous sommes rentrés dans l’ère de l’anthropocène, carrefour de société et de l’évolution d’une humanité, ère de tous les possibles et de tous les plausibles : extinctions de masse, transition ou nouvel essor de l’humanité. Dans les mutations à venir nous aurons à faire face et à résoudre une multitude de situations et de questions dont les principales sont : notre environnement et sa pérennité, la notion de progrès et de son sens, les concepts “humain” – “non humain”.

Questions et réponses pourront se succéder en continu. Cependant dans leurs prolongements particulièrement quant au désir d’une longévité de qualité, une nouvelle dimension se fera jour : à quel moment commencera l’acharnement thérapeutique génétique ou biotechnologique ? Et si le vieillissement est une maladie, alors peut-on se poser cette autre question : naître est-il le début d’une longue maladie ? Au niveau sociétal et personnel, il deviendra nécessaire de trouver le juste milieu, le point d’équilibre entre la dimension quantitative d’une durée de vie et celle qualitative du vécu d’un sens de vie ?

Nous aurons à répondre aux espérances et aux inquiétudes et faire acte de prévention en définissant les choix à venir et surtout en ouvrant les réponses : Homme libre et heureux, programmé, augmenté ou remplacé.

Réfléchissons sur cette pensée de Jean Rostand “La science a fait de nous des dieux avant que nous ne méritions d’être des hommes”.

La Fondation ANTHONY MAINGUENE dans cette optique, souhaite prolonger cette notion, que toute réussite authentique d’un projet, d’une équipe, d’une structure se fait avec l’Homme.

Que l’on pourrait résumer par cette simple phrase d’Anthony :

“L’Humanité est une aventure solidaire et responsable qui passe par l’Autre”

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